J’ai le choix entre 2 escaliers après avoir découvert un couloir muni de portes identiques à la mienne, ouvertes pour la plupart.
Une décision purement instinctive me dit que la salle commune dont m’a vaguement parlé le médecin se trouve forcément en bas et cette logique me donne le résultat escompté.
Me voilà donc qui débouche dans une vaste salle peuplée d’une population plutôt bigarrée.
Avec l’impression étrange de débarquer dans un asile d’aliénés, je me mets naturellement en retrait.
Je crois d’ailleurs que c’est dans mon tempérament, je dois être quelqu’un d’observateur plutôt que quelqu’un qui a le contact facile
C’est vrai qu’ils n’ont pas l’air nets : discussions stériles, abêtissement devant un film datant des antipodes du cinéma, attitudes pas rassurantes…
Je n’ai pas vraiment envie de me fondre dans la masse et je reste donc à les observer jusqu’à ce qu’elle vienne me voir.
Elle dit s’appeler Phoenix (du moins comme ici personne à ce qu’elle dit ne connaît son propre nom c’est ainsi qu’on la surnomme) et elle est vraiment très belle.
Très stressée aussi, mais ma présence semble lui faire plaisir, elle a visiblement envie de parler. D’elle, de l’endroit dans lequel on se trouve, de son règlement et de la vie ici.
L’ensemble, elle mis à part, n’est pas franchement enthousiasmant, la question principale demeurant : qu’est-ce qu’on fout là ?
Et Phoenix continue à me parler, elle me fixe à un moment avant de me faire une révélation, qui la soulage mais qui m’inquiète –moi- sur sa santé mentale.
Tout en grillant une cigarette dans l’espace prévu pour ça, elle m’avoue tout.
Elle prétend être une journaliste venue enquêter sur la clinique de l’intérieur. Ne sachant plus rien du reste de son existence, elle me demande si je ne suis pas la personne envoyée par sa rédaction pour la sortir d’ici.
Navré, je lui réponds que je n’en sais rien, ce qui est vrai… Doublement navré, je me dis que si elle raconte ça à tout le monde, si jamais cela avait été vrai, elle aurait été grillée depuis longtemps…
Mais bon, si tant est qu’elle puisse être mon alliée, tout contact est bon à prendre…
Elle prend congé alors qu’une infirmière se dirige vers moi puis m’emmène voir mon docteur attitré.
Me voilà donc dans un cabinet, présenté au docteur Marchand, souriant tel un vendeur d'aspirateurs sûr de lui.
Il me parle lui aussi de ma présence au sein de cet institut et du bien fondé de bien suivre mon traitement. Il répond bien sûr négativement mais avec le sourire à mes boutades comme quoi j’aimerai connaître mon nom, mais bon grâce au reflet de la vitre de sa bibliothèque je peux au moins voir la tête que j’ai.
Maintenant je sais pourquoi Phoenix me disait que j’aurai peut être besoin d’une coupe de cheveux, mais je me dis que s’ils sont aussi bons coiffeurs que médecins, ce serait plutôt du genre : « touche à rien c’est parfait… »
Mine de rien, je me suis un peu découvert au fil de ces 2 discussions : plutôt quelqu’un d’instinctif, un peu charmeur, je me sens robuste et en pleine possession de mes moyens, quoique je soies un peu rêveur. Et que j’aime m’isoler parfois.
Il faudra par contre certainement que je me méfies du cynisme dont je peux faire preuve à certains moments, je sens que je pourrais m’avérer blessant si je n’y prends pas garde, et c’est un endroit ou je pense avoir intérêt à ménager certaines subtilités…
Mais bon je quitte cet entretien sans avoir appris grand chose de plus : ce que j’ai à apprendre sur moi, je devrai le conquérir par moi-même : tout un programme…